Dans ce topic qui reste consacré à la Sega Mega Drive, je souhaite évoquer ces jeux qui, dès les années 80-90, misent sur le malsain, qui multiplient les images d'horreur, qui soignent avec complaisance une atmosphère glauque, qui vouent un amour coupable au sang. Si nous explorions ensemble le côté obscur de la ludothèque de la Mega Drive ?
Les pères fondateurs : Splatterhouse II et consortsIl n'est pas forcément nécessaire de rechercher bien loin les premières apparitions d'horreur sur Mega Drive.
Ghouls'n Ghosts, classique s'il en est, débute dans un cimetière où déambulent des squelettes armés de faux. On reste toutefois en pleine atmosphère chevaleresque.
Altered Beast, le premier jeu vendu avec la Mega Drive avant l'arrivée du hérisson bleu, débute également avec des morts vivants et d'autres ennemis tenant leur tête dans leurs mains. Même un "simple"
Kid Chameleon exploite l'imagerie de l'horreur, certes avec modération, mais avec un certain bonheur : l'écran-titre du stage 1, "In the Woods", dessine deux arbres couverts de visages grimaçants, tandis que le héros aime à se changer en lanceur de haches aux allures de Jason Voorhees.
Altered Beast
Tout cela demeure cependant bien gentillet. Il y a plus fort. Bien plus fort. Bien plus sanglant, bien plus horrible, bien plus malsain. Le porte-étendard du gore sur Mega Drive se nomme
Splatterhouse II (en anglais, le verbe "to splatter" signifie "éclabousser", ou "gicler" ; tout un programme). On ne présente plus ce jeu où l'on dégomme des zombies et des monstres visqueux qui explosent sous les coups de poings, de barre de fer ou de fémur généreusement dispensés par le héros Rick, dont le masque n'est pas sans évoquer, lui non plus, les
Vendredi 13 initiés par Sean S. Cunningham. Les décors sont sanglants et glauques à souhait ; quant aux boss, ils sont délicieusement repoussants, à l'instar de cette créature ventrue dévoreuse de zombies, ou ces affreux bébés pendus qui vomissent un étrange liquide verdâtre...
Splatterhouse II
Certains gamers rangent le shoot-them-up
Gynoug dans cette catégorie de jeux. Il n'est pas faux que les boss de fin de stage, surtout, peuvent être qualifiés de malsains, comme on le lit parfois. Mais dans le genre malsain, on s'attardera davantage sur le jeu de flipper
Dragon's Fury. Celui-ci ne donne pas vraiment dans la demi-mesure, pour peu que l'on soit sensible à ce qui se passe devant nos yeux. Toute une imagerie infernale est à l'oeuvre dans ce jeu. Au centre du flipper, un visage féminin endormi s'éveille pour se transformer peu à peu en face reptilienne sous l'action de la boule. Ce faisant, il passe par différents stades sont certains sont proprement horribles. Le reste n'est que crânes (rigolards ou non) et créatures démoniaques, tandis que les stages bonus sont plus horrifiques les uns que les autres. Mention spéciale pour ces trois crânes qui suivent de l'oeil les déplacements de la boule, et pour cette créature géante dessinée dans un décor organique, et qui laisse sortir de sa bouche une sorte de langue gigantesque et couverte de visages torturés.
Dragon's Fury
"Finish them !"Quand on parle de gore sur Mega Drive,
Mortal Kombat vient assez rapidement en mémoire. Si le premier opus propose un mode sanglant activable, la licence va de plus en plus loin dans le glauque, le sinistre et le sordide, jusqu'à culminer dans son troisième chapitre -- et son avatar
Ultimate Mortal Kombat 3. L'horreur, soulignée par des musiques tout à fait adéquates, est présente dans les décors, dans ces piliers émergeant de la lave et couverts de squelettes, dans ces sables mouvants où un cyborg se débat pour l'éternité ; elle est présente dans le sang et les cris de combattants à longueur de rounds, dans les coups spéciaux qui ne font pas dans la dentelle (les éventails meurtriers de Kitana, les lames de Baraka) ; mais c'est surtout dans les fatalités qu'elle se manifeste, dans ces fatalités de décor ou de coup qui nous font finir en morceaux, haché menu, découpé en rondelles façon salami, broyé ou encore carbonisé... Avec un peu de chance, on s'en sort avec une babalité ^^
Mortal Kombat 3
Dans les jeux de combat gore, la saga des
Mortal Kombat est un peu l'arbre qui cache la forêt.
Eternal Champions est d'un gore plus discret, qui ne se lâche qu'au moment des fatalités : c'est là qu'on finit grillé sur un bûcher, déchiqueté par un ventilateur géant, ou désintégré par des robots futuristes adeptes de la propreté sur le ring. Enfin, il faut dire un mot de
Primal Rage, jeu de combat entre dinosaures, longuement (et sans doute trop) décrié. Au petit jeu des coups les plus sanglants, Sauron et Armaddon décrochent sans doute la palme ex-aequo, le premier pour dévorer sa victime en fin de combat, le second pour le clouer au sol -- au sens propre comme au figuré -- dans un bruit d'os broyés.
"Cachez ce sang que je ne saurais voir"La censure a sévi sur un certain nombre de titres, parmi lesquels des jeux de la première heure sur Mega Drive. Les autorités bien-pensantes, qui avaient déjà trouvé Blaze trop sexy dans la saga des
Streets of Rage (c'est sa minijupe qui posait problème ?...), ont ainsi revisité l'un des tout premiers jeux édités sur Mega Drive,
Mystic defender (
Kujaku Ou 2, au Japon). Cela passe d'abord par une occidentalisation du jeu : Ashura devient Alexandra, la jaquette perd tous ses traits japonais, tout comme les écrans qui précèdent l'écran-titre... Ashura ne change pas seulement de prénom : nue quand son frère la retrouve dans la version japonaise de la scène finale du jeu, elle est parée de vêtements dans la version occidentale. Mais on peut s'étonner d'autres changements, pour ceux qui choisissent ce jeu pour son ambiance passablement malsaine, où des prêtres maudits se transforment en araignées, et où les labyrinthes biomécaniques opposent des créatures dont le visage rappelle celui de Freddy Krueger. Au stage 2, l'un des plus réputés, le héros arpente une ville hantée aux murs couverts de sang. De grosses têtes descendent les escaliers en rebondissant, mais les ennemis les plus glauques sont des bébés maudits qui, s'ils ne sont pas tués du premier coup, se tranforment en une sorte de bouillie infame où l'on devine encore un oeil. La censure a préféré colorer ces bébés en bleu-vert -- ainsi que ces fameuses grosses têtes -- comme pour camoufler leur apparence de bébé, et rendre l'épisode moins dur. Mouais...
Si ces changements de censure restent finalement mineurs sur
Mystic Defender, on ne peut pas en dire autant, fort malheureusement, de ceux qui ont fait de
Last Battle une honte aux yeux de nombreux gamers, si l'on en croit ce qui se lit à ce sujet sur le net.
Last Battle, au Japon, c'est
Hokuto No Ken, soit Ken le Survivant ; et dans cette version européenne que beaucoup condamnent, le personnage perd jusqu'à son nom ! Devenu Aarzak (en voilà une idée !), il se contente d'envoyer ses ennemis hors du champ quand, dans la version originale, ceux-ci disparaissent dans une explosion de sang - d'abord la tête, puis tout le reste. C'est tout de même plus pêchu, plus cohérent avec l'atmosphère de
Hokuto No Ken, mais tout ce rouge, c'était visiblement trop pour les jeunes Européens selon Messieurs les Censeurs !
Hokuto No Ken (Last Battle, vers. japonaise)
Fallait-il édulcorer ainsi l'aspect gore de ces jeux, et asagir la part noire de la ludothèque Mega Drive ? Quand on voit tout ce qui a suivi sur les consoles de nouvelles générations, des RPG sanglants aux zombies démocratisés, on se dit que c'était vraiment une autre époque... Un
Last Battle y a perdu tout son sel, un
Mystic Defender y a laissé son identité... Cette violence, explicite mais pixellisée, le méritait-elle ? La Mega Drive, en son temps, avait du cran. Et le politiquement incorrect a toujours tellement plus de charme !
Vous en voulez en-gore ?Voici, en guise de bonus, quatre autres titres qui entrent dans le champ du politiquement incorrect sur Mega Drive :
Castlevania - Bloodlines et ses monstres de cauchemar,
Doom Troopers et ses têtes qui explosent, l'hideux
Sword of Sodan(personne ne comprend comment Electronic Arts a pu sortir un jeu aussi laid et si mal animé) et ses têtes coupées, enfin
Chakan et son ambiance lugubre...
Castlevania - Bloodline
Doom Troopers
Sword of Sodan
Chakan